Doit-on commencer à se doter des moyens d’une guerre de haute intensité ? La France en a-t-elle les moyens ?
Avant de parler de haute intensité, il faut que l’on sache de quoi on parle. Dans un rapport d’information présenté par les députés Patricia Mirallès et Jean-Louis Thiérot, la haute intensité est définie selon cinq facteurs :
- Un brouillard des intentions, comme nous l’avons vécu avec la Russie six mois avant le déclenchement de l'offensive.
- Fin d'un relatif confort opératif (perte de notre suprématie territoriale sur terre et mer).
- Une forte attrition en homme et en matériel. Pour rappel, en Ukraine, c'est 25.000 obus qui sont tirés chaque jour (soit l’équivalent de la production annuelle de Nexter).
- Une incertitude quant à la durée de la confrontation et à la victoire militaire.
- Une population civile à la fois victime et instrument de la guerre.
La fragilisation actuelle de l'ordre international, la montée en puissance de nouveaux acteurs régionaux, l'extension du domaine de la conflictualité dans l’espace et dans les fonds-marins, le chantage migratoire, la guerre informationnelle ou encore le développement des cyber-attaques, sont tant de facteurs démontrant la nécessité d’augmenter le budget des forces armées.
En ce sens, la nouvelle LPM annonce quatre objectifs principaux :
- Le renforcement de notre souveraineté dans le champ de la dissuasion et de la résilience.
- La préparation à la haute intensité.
- La défense des espaces communs, fonds-marins et cyberespace.
- Le renouvellement des partenariats ainsi qu’une montée en puissance en matière d’influence.
Sur les 413 milliards (mds) prévus, près de 30 mds seront absorbés par l'inflation. 5 mds seront consacrés à la défense sol-air, 5 mds aux drones, et 2 mds pour les forces spéciales.
Par ailleurs, un autre objectif est de doubler le nombre de réservistes ainsi que les budgets de la DRM (Direction du renseignement militaire) et de la DRSD (Direction du renseignement et de la sécurité de la défense).
Le contexte géopolitique actuel met un lumière un problème de taille auquel notre société est confrontée. Les populations civiles ne connaissent que très mal les sujets militaires, et face à un monde qui se réarme, il est important de réussir à développer une conscience collective au sein du peuple français, concernant les enjeux stratégiques et militaires auxquels nous sommes et allons être confrontés.
Pour se préparer au mieux, il est important de renouer les liens entre civils et militaires, de définir quelle est la mission derrière, quel est l’ennemi, quelles sont nos faiblesses. Il faut donc cibler nos besoins, en répondant à ces questions :
- Notre volume en termes de forces conventionnelles est-il aujourd’hui suffisant pour engager le dialogue stratégique, le crédibiliser, éviter son contour ?
- A-t-on aujourd’hui la crédibilité suffisante pour commander une coalition ?
- Peut-on compter sur la dissuasion nucléaire pour protéger nos territoires d’Outre-Mer ?
La LPM bride les capacités de notre défense globale. Aujourd'hui, les personnels de la défense, du ministère des Armées, de la BITD (Base industrielle et technologique de défense) et des autres institutions similaires représentent à peu près 1,5% de la population active française. Cette LPM n’arme donc que 1,5% de la population. Toutefois, si la guerre en Ukraine nous a bien rappelé quelque chose, c’est que si ce sont les armées qui font la guerre, ce sont les nations qui les gagnent. C’est donc toute la population qu’il faut associer à l'effort de défense : les pouvoirs publics, le secteur privé, le monde associatif, les collectivités territoriales, tous nos concitoyens de manière générale.
Pour ce faire, la LPM repose sur cinq messages :
- Investir dans la défense, c'est sécuriser durablement la croissance.
- Notre puissance de dissuasion n’atteindra ses objectifs que si tous les concitoyens la comprennent et soutiennent ses fondements techniques, stratégiques et politiques.
- Il est aujourd’hui nécessaire de proposer une offre stratégique rénovée.
- Le doublement des effectifs de la réserve est essentiel afin de procurer des capacités humaines suffisantes à notre défense et constituer un levier d’action bien plus important.
- Si les objectifs d’augmentation des effectifs de la réserve sont atteints, c’est 100.000 réservistes de plus que nous devrons être en capacité d’équiper.